La photographie est au coeur de ma démarche, le point de gravité autour duquel convergent mes réflexions, ce qui m’importe sont les enjeux de sa réception : le passage entre l’image saisie, son devenir d’objet, le regard du spectateur et son interprétation.
Je travaille avec un des premiers mécanismes interprétatifs de l’image photographique soit la reconnaissance d’un élément du réel. Celle qui détermine l’accès aux images, la croyance en sa véracité et le point de vue du spectateur sur le travail de l’artiste.
La démarche de prise de vue et la réalisation plastique fonctionnent sur des rythmes temporels non linéaire. Les images se forment au gré de l'observation, elles impulsent un travail d'investigation ou reste des images en suspend, volontairement lacunaires dont la forme plastique tend à les faire sortir de la relation frontale classique entre le spectateur et la photographie.
Les titres sont une forme de transformation appliquée à l’image, je viens tantôt citer le lieu de prise de vue rappelant un contexte, une situation géopolitique, tantôt je détourne la référence par le biais de la métaphore, laissant ainsi le spectateur dans le doute face à la pertinence de ses propres déductions.
La présence sporadique de visages ou de corps permet d’amorcer une réflexion sur l’Histoire et notre contemporain comme prenant corps dans un agencement d’histoires singulières et subjectives. Cette suggestion de la relation affective au sein du corpus photographique soumet l’hypothèse que l’observation d’une réalité extérieure à soi est kaléidoscopique et demande à être incarnée pour se rendre visible. Elle suppose ainsi que toute position devant l’image, relève en un sens plus du phénomène de désir que du principe d’objectivité. Ce travail tend à proposer un espace critique où la photographie a déplacé sa fonction informative pour toucher aux dimensions singulières et politiques du regard.
Les matériaux ou structures choisies servent de support à la photographie autant qu’ils en accompagnent son signifiant. Je considère le dispositif comme un potentiel prolongement de l’image.
Ma pratique explore différents paramètres propres à la monstration d’une image photographique : son échelle, sa mise en espace, la légende qui l’accompagne, les sources divulguées ou passées sous silence…
Autant d’éléments qui viennent bousculer ce que j’appelle le malentendu photographique, autrement dit, la véracité immédiate accordée à l’image-source, à l’image-témoin devant l’événement.